Une irrésistible envie de tout changer marque une étape importante dans la carrière de notre invitée. L’histoire suit la vie de Lucie, une bibliothécaire passionnée qui, mise au défi par sa meilleure amie Zahra, se lance un défi, celui de redéfinir ses priorités. Dans le roman, Lucie est entière et passionnée, du genre à s’investir à fond dans tout ce qu’elle entreprend. Mise ainsi au défi, elle se lance à la quête de ce qu’elle attend réellement de la vie. Selon Zahra, l’important, c’est d’être à l’écoute de ce qu’on ressent pour se concentrer sur ce qui compte vraiment. Si elle a longtemps été obnubilée par sa carrière, la jeune bibliothécaire éprouve désormais le besoin de penser à elle et de placer sa vie amoureuse au premier plan. À la croisée des chemins, Lucie doit jongler entre les charges exigeantes d’un festival littéraire qu’elle organise, le retour inattendu de son ex-amoureux et ses désirs de maternité. Un dilemme qui va créer bien des bouleversements.

Échos littéraires : Chantal Brodeur, bonjour, merci d’avoir répondu à notre invitation. Il est bien loin le temps de Saul-Bellow de Lachine lorsque vous avez débuté votre parcours dans les bibliothèques. L’héroïne de votre roman s’appelle Lucie, elle incarne cette nouvelle génération de bibliothécaires engagées qui veulent faire découvrir les richesses de leur milieu. Pourquoi avoir choisi ce lieu important du savoir : la bibliothèque ?

Chantal Brodeur : Bonjour. Je voulais mettre en lumière la profession de bibliothécaire et faire découvrir le lieu de vie, d’apprentissage et de découverte exceptionnel que sont les bibliothèques publiques. C’est un univers riche et stimulant et j’ai fait le pari d’y camper une intrigue. Depuis la dernière décennie, les bibliothèques québécoises se sont transformées et j’ose espérer que le portrait que j’en fais incitera mes lecteurs à fréquenter davantage leur bibliothèque municipale! Par ailleurs, je serais ravie si le personnage de Lucie inspirait de nouvelles vocations !

Échos littéraires : Votre premier roman, Miss Biblio en fait trop, a été lancé dans un contexte assez particulier, qui est celui de la pandémie. Malgré cela, il a su trouver son public, notamment grâce à l’engagement des bibliothécaires et des libraires. Est-ce une nouvelle preuve de l’indispensable place que possèdent les bibliothécaires et des libraires dans nos vies ?

Chantal Brodeur : Tout à fait! Chacun des acteurs de la chaîne du livre contribue à promouvoir et valoriser les ouvrages québécois auprès des différents publics, que ce soit par le biais d’outils promotionnels, de recommandations ou d’activités de médiation. Se faire connaître comme auteur ne se fait habituellement pas du jour au lendemain! Il est vrai que mon premier roman n’a pas été publié dans un contexte idéal, mais plusieurs personnes ont cru en moi, notamment notre Premier ministre qui a parlé de mon livre sur ses réseaux sociaux, et aussi des bibliothécaires qui ont organisé des rencontres déterminantes avec des lecteurs de la première heure. J’ai toujours en tête ce déjeuner littéraire inoubliable à Notre-Dame-des-Prairies ou encore cette entrevue virtuelle à la Grande bibliothèque avec des questions en alternance pour la bibliothécaire et pour l’auteure! Les bibliothèques constituent une vitrine exceptionnelle pour les auteurs émergents. J’ai eu la chance de vivre des situations qui m’ont donné confiance et m’ont permis de progresser comme auteure. D’amoindrir le fameux sentiment d’imposteur.

Échos littéraires : Parlons de votre second roman, Une irrésistible envie de tout changer. Ce roman, allie humour, tendresse et réflexion profondes. En fait, vous invitez carrément votre public à réfléchir sur leurs choix de vie tout en leur offrant une lecture légère et pleine de vivacité. Pourquoi donc (comme le titre le dit si bien) cette envie de tout changer ?

Chantal Brodeur : J’ai commencé à écrire ce roman dans le contexte postpandémique, où collectivement, on se questionnait à propos de nos choix et modes de vie, de la course folle du quotidien. À l’époque, de nombreux Québécois sont déménagés en région éloignée pour vivre autrement. Il est certain que tout cela a teinté ma propre réflexion et a titillé l’auteure en moi. J’ai eu l’idée d’utiliser la fiction pour illustrer qu’on peut choisir de réinventer sa vie pour être en meilleure adéquation avec ses aspirations et ses valeurs. Je voulais que l’intrigue soit parsemée de douceur et de bienveillance, que ce soit un roman qui fasse du bien.

Échos littéraires : Est-ce qu’il y a une part de Chantal Brodeur dans le personnage de Lucie ?

Chantal Brodeur : Plusieurs personnes me posent cette question ! Sans doute que oui ! Je suis moi-même bibliothécaire, impliquée dans ma profession (fière de siéger au conseil d’administration de Bibliothèque et Archives nationales du Québec), j’ai fait beaucoup de course à pied… mais la comparaison s’arrête là! Lucie est un personnage de fiction, avec sa propre identité, sa vision de la vie et un caractère beaucoup plus flamboyant que le mien! C’est justement pour me dissocier du roman que j’ai choisi de situer l’histoire dans un village fictif du nom de Blanche-La Neuve. Ce n’est donc pas mon histoire ni celle de ma bibliothèque que je raconte, vous le comprendrez en lisant le roman !

Échos littéraires : Dans Une irrésistible envie de tout changer, on retrouve une Lucie plus légère, enivré par l’amour. Après avoir touché le fond, Lucie éprouve le besoin de penser à elle. Elle se met en quête de ce qu’elle attend de la vie. La réflexion est profonde, est ce que nous faisons assez pour nous-mêmes a votre avis, ou bien, nous nous délaissons ?

Chantal Brodeur : Lucie est une passionnée, une fille qui carbure aux défis! Au-delà de tout le reste, elle est animée par son travail et prête à tout donner pour réaliser ses projets les plus fous. Dans « Miss Biblio en fait trop », elle finit par dépasser ses limites et prendre conscience que son travail l’éloigne de tout le reste. C’est un moment sombre. Dans « Une irrésistible envie de tout changer », le temps a fait son œuvre et un processus de réflexion s’entame. Il s’agit d’un roman lumineux! Lucie est toujours passionnée par son travail, mais elle a besoin de renouer avec les gens qu’elle aime et prendre soin d’eux. Elle se demande ce qu’elle attend de la vie et aimerait mieux cerner ses aspirations en tant que femme. C’est en ouvrant cette porte, en se choisissant, que son histoire d’amour avec Shilam devient possible et cela va vraiment tout changer. Je crois en effet que la quête d’équilibre n’est pas toujours simple. Un jour ou l’autre, on aimerait tous avoir la liberté de prendre la route pour s’accorder le temps de réfléchir et se choisir!

Échos littéraires : Dans votre premier roman, vous effleurez la Côte-Nord par l’entremise du deuxième personnage principal, un Métis qui y habite. Le roman se déroule entre Lanaudière et la Côte-Nord, des lieux que vous aimez et dont vous souhaitez qu’ils soient plus visités et accessibles. Parlons-nous assez de la Côte-Nord à votre avis ?

Chantal Brodeur : La Côte-Nord est une région magnifique, mais son éloignement fait en sorte que les gens la connaissent peu. Mon roman est paru à peu près au même moment que le lancement d’une superbe campagne publicitaire de Tourisme Côte-Nord. Une belle coïncidence! Outre le désir de faire rêver mes lecteurs avec les paysages à couper le souffle, la beauté du fleuve qui devient mer et la gentillesse des Nord-Côtiers, j’ai choisi de mettre la Côte-Nord à l’honneur parce que j’ai un attachement particulier à cette région. Mon père, aujourd’hui décédé, a jadis travaillé à la construction du barrage de Manic-Cinq (Daniel-Johnson). Mes parents ont vécu quelques années à la Manicouagan et donc moi aussi, à ma naissance. Quant à Shilam, j’ai imaginé ce personnage parce qu’il était important pour moi de créer un univers qui soit représentatif du Québec, autant dans la diversité que dans l’inclusion. Il y a donc aussi Soraya, l’alliée précieuse de Lucie qui est d’origine maghrébine et Arno, son ami alsacien…

Échos littéraires : Je sais que vous avez beaucoup de projets et ce roman n’est certainement pas le dernier récit de Chantal Brodeur. Pourriez-vous nous en dire plus ? Un troisième roman, est-il en préparation ? Assisterons-nous à un autre volet des aventures de la sympathique Lucie ?

Chantal Brodeur : Il est certain que j’ai en tête plusieurs projets d’écriture, dont un troisième volet pour conclure l’histoire de Lucie. J’ai toutefois plus d’idées que de temps! Je travaille actuellement à un projet de roman complètement différent des deux premiers. C’est une intrigue qui me tient à cœur et qui présentera une toute nouvelle galerie de personnages, avec de nouveaux lieux et de nouveaux enjeux. Est-ce qu’il y aura une bibliothèque? La question se pose… Inclure les bibliothèques publiques dans la fiction demeure ma prémisse de départ en tant qu’auteure. C’est donc à suivre! En conclusion, j’aimerais profiter de l’occasion pour remercier les lecteurs de m’encourager en choisissant de lire mon livre! Un grand merci de me faire suivre vos commentaires de lecture. C’est chaque fois un cadeau et cet échange m’enrichit comme auteure.

Échos littéraires : Merci beaucoup, c’était vraiment très enrichissant

Chantal Brodeur : Merci à vous de m’avoir proposé cette belle entrevue! J’étais honorée de répondre à vos questions!