Ahcène Beggache est né en 1972 à Imaandène, petit village de la commune de M’kira dans la wilaya de Tizi-Ouzou, en Algérie.
Chimiste de formation, il a enseigné pendant plus de 12 ans le français, et depuis 2012, il est inspecteur de Français. Son premier roman est sorti en septembre 2020. Bercé par la littérature, française en particulier, il ne tarde pas à découvrir en lui cette passion irréfrénable d’écrire.
Durant son enfance, il devait faire 3 kilomètres chaque jour pour rejoindre les bancs du collège. L’auteur de « Ce que l’amour doit à l’amitié » sortie en 2020, et « Et si tu écoutais mon cœur ! », édité en 2022, a enseigné le français au cycle primaire pendant douze ans.
Il est actuellement inspecteur de l’éducation nationale. Alcène Beggache, enseignant et écrivain vient de publier son nouveau roman aux éditions Talsa.
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Le nouveau roman du fils de Tizi Ghennif porte le titre : « Le berceau de la haine ». L’histoire est très originale. L’auteur raconte la trajectoire d’un personnage prénommé Kamel et qui est médecin de profession. Après avoir vécu en France, Kamel décide de retourner au bercail. Oui, revenir en Terre-Natale. Non pas pour y passer quelques semaines de vacances, mais pour s’y établir définitivement. De facto, il décide de renoncer à sa confortable vie en France. Kamel décide de rester aux côtés des siens pour des raisons que le romancier déroule tout au long de son récit. Le personnage de Kamel est vraiment particulier. Il était bien confortable en France, il est médecin, rien ne lui manque, mais voilà, il décide un beau matin de retourner au bercail, de rentrer en Algérie, pour s’y établir définitivement. Pourquoi ce choix de vous mettre dans ce personnage, qui est pourtant bien établi en France, mais qui lâche tout, pour revenir parmi les siens ?
Échos littéraires : Vous explorez, dans vos romans, les profondeurs de la société kabyle, où les mœurs, l’amour, la haine, l’amitié, les relations familiales, l’argent et les intérêts s’affrontent. Comment se porte justement cette société kabyle ?
Ahcène Beggache : Elle se porte plutôt bien, puisqu’elle n’a pas abandonné la lecture, l’instruction de ses enfants et l’enseignement des valeurs humaines. Une nouvelle génération de lectrices et lecteurs arrive ; je pense qu’elle est autant exigeante que ses prédécesseurs. J’ai eu l’occasion d’échanger avec des lycéens, des étudiants, et même des collégiens à l’occasion des salons de livres (Boudjima, Ath Yenni et Ouasifs) leur soif de lecture est évidente, mais ils s’intéressent plus aux écrivains de renom qu’à l’écrivain algérien. Je pense que nous, les écrivains, écrivons plus sur nous-mêmes, ou sur notre entourage que sur la société algérienne ignorant ses différentes mutations ; si nous continuons ainsi nous serons coupés de notre jeunesse, car elle ne reconnaît pas nos personnages, ne s’identifie pas à eux. Cela ne peut se faire qu’en brisant certains tabous, ce qui n’est pas toujours facile parce que l’hypocrisie collective a pour vocation de protéger bec et ongles les sacro-saints quand bien même ceux-ci nuisent à l’intérêt général ; C’est justement ce que j’essaie de faire dans mes trois romans. Dans mon dernier roman « le berceau de la haine », j’aborde le sujet de la prostitution dans les milieux conservateurs, la trahison maternelle, et les dégâts du silence collectif d’une société complice et coupable des malheurs des faibles.
Échos littéraires : Avec ce nouveau roman, vous deviez être présent au salon du livre d’Alger, mais vous n’étiez pas présent. Sur votre page Facebook, vous mentionnez à vos lecteurs, que c’est à cause de la bêtise humaine que vous n’étiez pas. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Ahcène Beggache : Quand j’ai commencé à écrire, j’ignorais, comme la plupart de mes confrères, que le livre et l’argent pouvait faire bon ménage. En 2020, pour éditer mon premier roman « ce que l’amour doit à l’amitié », j’ai dû débourser deux cent mille dinars, ce qui est beaucoup pour un enseignant, j’ai failli renoncer à mon rêve de devenir écrivain. En revanche, je n’avais pas trouvé de difficultés à éditer mon deuxième roman « …et si tu écoutais mon cœur ! » En 2022 et à rééditer mon premier roman. À ma surprise, quand je m’apprêtais à éditer mon troisième roman, on m’avait demandé de payer. Pourquoi ? Je l’ignore. Je suis donc allé voir ailleurs. Pour revenir à votre question, effectivement, je m’attendais à ce que je sois invité au SILA par mon ancien éditeur pour dédicacer mes deux premiers romans : il faut comprendre que tous mes confrères participent avec leurs maisons d’édition. Certains ont édité des livres dans trois ou quatre maisons d’édition différentes ; chaque maison leur a réservé un créneau pour les dédicaces. J’ignore pourquoi on n’avait pas fait de même pour moi. Cela m’aurait permis à la fois de revoir mes lecteurs et recevoir leurs retours après lecture de mes deux premiers romans et de faire la connaissance de nouveaux lecteurs. J’espérais également présenter mon troisième roman dans le stand de ma nouvelle maison d’édition. Cette dernière n’avait pas pris part au SILA pour faute de moyens. Comment peut-on priver un auteur de revoir ses lecteurs ? De quel droit peut-on priver un écrivain de participer à sa propre fête ? Je pense que si l’écrivain est aujourd’hui marginalisé, forcé à s’endetter pour voir son livre dans les librairies, c’est en partie la faute de la bêtise humaine. Cela étant dit, je suis convaincu qu’à toute chose malheur est bon.
Échos littéraires : Vous faites partie de cette nouvelle génération de jeune écrivain algérien. Que pensez-vous de la production de la littérature francophone en Algérie ? Vous êtes aussi cette relève.
Ahcène Beggache :Je n’ai pas la prétention d’être la relève de la production littéraire ; j’essaie juste d’être témoin de ma génération et d’inviter le lecteur à regarder autour de soi pour voir la peine, sentir la tristesse et vivre la souffrance des gens ; cela commence par l’observation. Beaucoup d’histoire mérite d’être écrite pour apprendre à nos enfants l’empathie, l’émulation et la générosité. Un peuple perd ses valeurs quand il abandonne la lecture. On lit à nos enfants les contes pour leur apprendre les valeurs universelles ; aujourd’hui, l’adulte lit de moins en moins, que dire de l’enfant ? Pour revenir à votre question, la production de la littérature se porte plutôt bien, chaque année de nouveaux écrivains arrivent dans la scène littéraire francophone, ce qui manque, c’est la promotion du livre de manière générale ; je pense que le livre n’est pas à la portée de tout le monde : un roman coûte en moyenne 800 dinars, ce qui est cher pour un revenu moyen, parce qu’un lecteur n’achète pas un, mais plusieurs livres. Si le livre est cher aujourd’hui, c’est parce qu’il est plus un moyen de gagner de l’argent qu’un outil d’instruction ou de culture. De plus, je crois qu’il faudrait peut-être penser à organiser des salons du livre dans les quatre coins du pays pour rappeler combien le livre est important pour nous. En outre, aujourd’hui, le livre est menacé par les différents outils électroniques, qui sont à la fois ludique et instructifs.
Échos littéraires : Vous dites : Quand j’écris, je suis l’âme, le cœur et la chair de chacun de mes personnages. C’est quoi votre force justement pour être partie prenante de vos personnages ?
Ahcène Beggache : Se mettre à la place de l’autre, c’est ce que je sais faire le mieux. Cela m’arrive souvent de pleurer en lisant un livre. Quand j’écris, je suis une autre personne. Vous savez une fois, lors de l’écriture de mon deuxième roman « …et si tu écoutais mon cœur ! » Mon épouse m’a surpris, vers minuit, en train de pleurer, elle était terrifiée à l’idée qu’un malheur fut arrivé à moi ou à notre famille. Quand je lui appris que Lydia, mon personnage principal, fut emprisonnée, elle fut énervée, mais soulagée. C’est pour vous dire que je suis réellement le père et la mère de mes personnages : je pleure quand ils sont tristes et je suis heureux quand ils le sont.
Échos littéraires : chimiste de formation, professeur de français, puis inspecteur de l’enseignement primaire de la langue française, auteur, vous êtes un exemple pour bien des jeunes qui entament leurs vies. Qu’avez-vous à leurs dires à ces férus de littérature ?
Ahcène Beggache : humblement, je leur dirai que chaque projet sans planification est une aventure coûteuse en termes de temps, les erreurs nous apprennent à être meilleurs, les réussites sont le fruit d’une ténacité acharnée, et donc ne renoncez pas à vos rêves d’écrire encore et encore. Enfin, je leur dirai que l’écriture est un voyage plein de surprises, alors laissez votre imagination vous surprendre.
Échos littéraires : Merci beaucoup,
Ahcène Beggache: C’est un plaisir !
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